Journal pèlerinage Shikoku

Jour 11

Lundi 23 septembre 2019

Temples visités : 4bis

0km
Distance du jour
0yens
Dépense du jour
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Distance du depart
0yens
Dépense totale

La nuit a été un véritable enfer ! La pluie a rapidement cessé dés le soleil couché mais le vent, lui… un vent de tous les diables dont les rafales se succédaient à un rythme infernal. La tente était secouée dans tous les sens. Elle pliait, s’aplatissait de droite à gauche, d’avant en arrière mais telle un roseau, elle a accepté les contraintes sans céder. Moi, à l’intérieur, je n’en menais pas large… J’angoissais que les arrimages lâchent et que seuls mon propre poids et celui de mes affaires gardent la tente au sol. Les minutes se sont égrainées dans cette tourmente épeurante jusque vers 3 heure du matin. Après les rafales se sont estompées et espacées. Les fixations de la tente ont tenu bon !!! Mais ça n en finissait plus ! Rester cloitré, confiné dans une tente pendant plus de 24h sur un sol en béton, c’est loin d’être confortable et ça finit par être long, très long…Je suis probablement tombé endormi en pointillé, le corps courbaturé et douloureux. La nuit a été aussi longue que la journée.

Il est 5h la lumière du jour commence a s’affirmer. Tout est calme. J’entends même le gazouillis des oiseaux. Je tente une sortie à l’extérieur. Je suis surpris de constater qu’il fait beau… très beau même !! Le ciel est bien bleu malgré des amas de nuages épars. Le souffle du vent est juste comme une caresse. Le soleil se lève sur l’océan et éclaire les falaises en contrebas. La mer s’est nettement calmée. Mais où est donc passée la tempête ? L’évidente perspective d’une très belle journée remonte mon moral en flèche…Journal pèlerinage de Shikoku

J’attache une corde entre deux des poteaux de l’abri. J’y suspends toutes mes affaires pour que le vent et le soleil en assèche l’humidité. Et petit à petit, j’entreprends le pliage de la tente et la préparation du sac-à-dos. C’est long et fastidieux mais tout finit par rentrer dans l’ordre et arrive finalement le moment du départ. Je charge mon sac sur le dos, prend mon fidèle bâton et après avoir admiré une dernière fois la vue sur l’océan, je reprends le chemin, enfin…Journal pèlerinage de Shikoku

Je déchante vite : Le chemin est boueux, gorgé d’eau. La terre, grasse, s’accumule sur mes chaussures. Mes pieds sont bien plus lourds à soulever du sol. Au fur et à mesure de ma progression, je découvre les stigmates de la tempête passée ; des arbres déracinés, des branches cassées… Je suis vraiment chanceux de m’être sorti de ces 2 jours infernaux avec seulement des courbatures !

Ça descend raide. A peine arrivé au niveau de la mer, ça remonte aussitôt. Ils n’ont pas l’air de connaitre les ascensions en lacet au Japon : C’est au plus direct : la ligne droite est privilégiée. Ce doit être pour se sculpter de beaux mollets… En plus de la boue, il y a une bonne épaisseur de feuilles mortes sur lesquelles je glisse et manque de tomber plusieurs fois. Et tout à coup, je me rend compte que sous les feuilles il y a aussi… des serpents !!! Je manque de marcher sur une sorte de grosse couleuvre mais en était-ce bien une ? Elle disparait bien vite en ayant probablement plus peur que moi mais le mal est fait : la peur me prend au ventre ! Il y a un serpent venimeux sur Shikoku : une vipère nommée Mamushi. Impossible de savoir de quel serpent il s’agit… Ma peur est exacerbée par la fatigue, la saleté et le fait de marcher depuis des heures sans avoir la moindre indication du moment où je rejoindrai la route…! Un chemin idéal pour les amoureux des beautés de la nature qu’ils disent ?… Je me méfie de chaque endroit où je pose les pieds. Je frappe le sol à l’aide de mon bâton. Par 3 fois, je vois un reptile se glisser hors du chemin !! J’essaye désespérément de rester zen…Journal pèlerinage de Shikoku

Et puis, au bout de ce qui me semble une éternité, la délivrance : La route, enfin !! J’ai débouché dessus tout à coup, sans prévenir, au détour d’un virage. Au comble de l’étonnement, le stress qui m’accompagne depuis hier disparait instantanément. Je ressens un regain d’énergie et le positivisme m’envahit aussi surement que le soleil me réchauffe le corps. Finie la boue, finis les serpents, une grosse épreuve vient de s’achever. Je peux continuer ma quête… Hourra !!

C’est un délice de marcher sur de l’asphalte. La route est haute en altitude. Je profite des rares points de vue pour me reposer et tenter de faire sécher mon t-shirt trempé de sueur. Sur ces entre-faits, arrive Erika suivie de prés par Sandrine. Ce sont deux françaises aperçues au cours de la cérémonie du temple n°6. Elles étaient alors accompagnées par Tim, un anglais qui a marché les trajets Londres/Santiago-de-Compostelle et Londres/Rome. On se salue et discutons un peu en cheminant. Étonnamment, car je n’en ai pas ressenti le besoin jusqu’ici (ça fait tout de même prés de 15 jours que je n ai pas parlé français), j’ai envie de socialiser. On se raconte essentiellement d’où on vient et comment on en est arriver au Pèlerinage des 88 temples. L’une pense le marcher pour moitié et faire l’autre moitié l’année prochaine. L’autre envisage de compléter le tour mais en utilisant les transports en commun, les bus et les trains. Puis, comme nous marchons chacun à notre propre rythme, on finit par se distancer les uns des autres.

Arrivé à un point de vue servant aussi d’aire de repos pour les voitures, un jeune couple de motards me fait Osetai d’une boisson énergisante. Ils parlent peu anglais mais sont très souriant. Bonheur et joie de vivre émane de leurs visages. On se comprend à demi-mot, principalement avec le sourire des yeux…En partant, le garçon me détrompe en me disant que c’est elle la conductrice et propriétaire de la grosse Kawasaki. C’est vraiment un beau couple sympathique ! Sur le même parking je vois un mini-camping-car. Amateur de road-trip, je prends un moment pour admirer ce petit camion équipé d’une parabole et de panneau solaire. J’aimerai bien discuter avec le propriétaire de ce petit bijou mais il semble être en train de faire la sieste…Journal pèlerinage de Shikoku

Sandrine et Erika m’ont rejoint. Ensemble nous quittons le point de vue. La route serpente en descente pour arriver au niveau de la mer. On traverse un petit port et, tout de suite après, une petite baie se présente. L’océan est agité et la plage, parsemée de cailloux. Il y a des surfeurs qui essayent de profiter des vagues. J’ai vraiment envie de me jeter a l’eau et les rejoindre mais je me contrôle car je ressens la fatigue de mes deux dernières nuits et je n’ai aucun plan prévu pour ce soir. Les filles m’apprennent qu’elle ont réservé des chambres dans une pension située aux environs du 4ème bekkaku, Saba Daishi. Sur la carte de mon guide je vois qu’il y a également un camping à proximité… Pas d’inquiétude, les choses ont de grandes chances de se mettre en place toutes seules, je vais suivre mes accompagnatrices et laisser venir…

Un panneau nous indique que 64km nous sépare du cap Muroto. Il semble que généralement les henros prennent un transport en commun pour s’y rendre pour 2 raisons : d’abord, c’est là-bas que se situe le prochain des 88 temples, ensuite, la route, sans relief, ne fait que longer l’océan. Ils ne trouvent aucun attrait à cheminer aussi longtemps sur cette voie coincée entre la montagne et la grande bleue. Moi c’est le contraire : j’avais hâte d’arriver sur ce tronçon là et pouvoir garder longtemps un accès direct à l’océan. Je suis chanceux : il fait beau !!

4 km, soit une petite heure de marche et nous atteignons…Journal pèlerinage de Shikoku

Temple 4bis : Saba Daishi

Le complexe en lui-même est petit et assez commun. Ce qui est remarquable c’est un tunnel qui s’enfonce en spirale sur une bonne centaine de mètres dans la montagne. Il permet de rejoindre l’autel du temple principal. La mise en scène du rituel spirituel de cheminement est captivante : pour nous accompagner, sur la gauche, coté extérieur de la spirale se trouvent des dizaines de statues de bouddha : Une statue pour chaque pas. Les pèlerins se placent face à une statue, prient, chantent puis avancent d’un pas pour se trouver face à la statue suivante où ils prient et chantent de nouveau. Ils vont de statue en statue jusqu’au fond de la grotte. Il y a au bas mot 150 statues… faut avoir le temps ! Çà me rappelle un peu le Tibet où le protocole d’accès aux temples est, de loin, beaucoup plus fastidieux… Au dessus de chaque statue, se trouve une grande photo ancienne encadrée et au pied, un lotus. Leur éclairage est indirect et individuel ce qui accentue le coté mystique de l’endroit. En progressant dans le tunnel, j’ai le sentiment que chacun de mes pas me rapproche de la Grande Révélation… Nous ne sommes pas nombreux à visiter ce petit temple plein de charmes. Je resterai bien plus longtemps si je ne me sentais pas autant harassé de fatigue et de crasse…

La femme qui nous accueille chaleureusement à l’hôtel Kaizan-so me dit que pour 5200 yens je peux rester dormir, manger et boire une bière bien fraiche…. Wow… Belle perspective ! Ce n’est vraiment pas excessif !! Je suis content et rassuré. Je me sens comme récompensé des épreuves des derniers jours… La place est magnifique. J’ai le sentiment d’être dans l’antichambre du paradis !!! Que ce soit de ma chambre ou de la salle à manger, il y a toujours l’océan en vue panoramique. Nous sommes les seul clients pourtant c’est très grand et très propre. Ma chambre, très sobre, est typiquement japonaise. J’installe le futon et fait mon lit. Je me déshabille, enfile le kimono fourni, mets mon linge sale dans la machine-à-laver et file récurer mon corps à l’onsen ! A ma sortie du bain, j’ai l’impression d’être en coton. Tout est vraiment parfait à l’image du plateau repas où chaque ingrédient est disposé à grands soins comme ces deux grosses crevettes disposées en forme de cœur et agrémentée d’une petite branche de feuilles aromatique. J’essaye de profiter au mieux de toutes les attentions qu’à eu la propriétaires pour rendre notre séjour merveilleux mais ma grande fatigue de conduit rapidement au lit. Repus et heureux, je sombre instantanément dans un sommeil profond et sans rêve…Journal pèlerinage de Shikoku

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Carte Shikoku 88 temples

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